Ethnologie française, 4, vol. 44
Le propos de ce dossier thématique se situe à la convergence de deux séries d’évolutions qui ont concerné notre discipline. D’une part, l’identification de l’ethnologie à une pratique scientifique et l’injonction à situer les travaux ethnologiques dans le champ des "sciences sociales" n’ont cessé de s’affirmer dans le contexte d’une institutionnalisation croissante de la discipline, et ce malgré la remise en cause généralisée du positivisme scientifique. D’autre part, de nombreux auteurs ont accompagné le tournant postmoderne de l’ethnologie en insistant sur l’importance des interprétations, de la réflexivité, de la subjectivité, de la sensibilité, et en plaçant au centre de la démarche ethnologique l’auteur comme instance de production d’un discours sur la culture [Geertz, 1973 ; Clifford et Marcus, 1986]. L’ethnologie contemporaine se retrouve ainsi tiraillée entre science et écriture, ce qui justifierait à soi seul de prêter attention à ceux qui, littéraires, restent dans nos sociétés les meilleurs spécialistes de l’écriture et de sa diffusion publique.