Modèles logiques et niveaux d'analyse linguistique

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Ouvrage
Auteur.e.s
Jean David et Robert Martin (dirs)
Numéro
2
Editeur
Université de Metz
Résumé

Présentation

Sans doute faut-il distinguer, dès le départ, le niveau de la langue et celui de la métalangue

A. La langue tout d'abord présente des aspects "logiques"

1. Les uns décriront des "structures profondes" de nature logique, reliables aux énoncés de surface par diverses règles de correspondance, B. POTTIER reconstruit ainsi, en termes logiques, toute une théorie des cas, J.-M. ZEMB une théorie de la proposition au moyen des concepts de thème et de rhème. J. DAVID essaie de restituer les notions "profondes" d'"actants" et de "circonstants" et R. MARTIN, postulant l'existence d'une composant sémantico-logique du langage, tente d'y définir les opérateurs de négation et d'inversions.

2. D'autres partiront à la rechercher de telle ou telle opération logique, de tel ou tel fragment de modèle mathématique adaptable à une description de phénomènes linguistiques ou se prêtant à une confrontation. Y. GENTILHOMME oppose la proportion mathématique et la "proportion linguistique". Ch. ROHRER fait appel aux logiques temporelles pour expliquer divers emplois du mot depuis. Il n'est pas question, cela va sans dire, de procédure réductionniste. Il s'agit sans plus de vérifier l'hypothèse d'une correspondance partielle des outils logiques et des outils linguistiques. On appréciera les précautions dont s'entoure R. ZUBER pour mettre en parallèle l'implication logique et la tournure si...alors du français. Le résumé entre la négation définie en termes de logique intuitionniste et l'intuition de la négation grammaticale. Quant à G. VAN HOUT, il démontre avec clarté que "dans leur tentative de créer un formalisme désémantisé à l'intérieur d'une langue naturelle, les aristotéliciens ont réussi à épuiser tous les types de raisonnement syllogistique que leur permettait la langue naturelle".

3. Sans doute les linguistes ont-ils beau jeu de souligner que la langue dépasse par sa richesse tous les systèmes formels : l'épaisseur socio-culturelle du langage apparente les préoccupations du linguiste à celles du sociologue et de l'ethnologue ; son aspect de mécanisme mental impose la collaboration avec le psychologue. Et comment oublier que le langage naturel est "connoté", qu'il s'accommode d'ambivalences, d'approximations, de malentendus de toutes sortes, auxquels le linguiste doit faire leur part, comme aussi aux jeux de langage et à la création verbale ? Alors que le calcul logique se passe de destinataire, l'usager du langage naturel parle pour quelqu'un dans une situation déterminée. Différence fondamentale. Elle n'exclut pas cependant le rapprochement avec le logicien dans ce domaine du discours, de l'"énonciation", de la "pragmatique". J.-B. GRIZE vise à construire une "logique naturelle" qu'il définit comme "l'art d'engendrer des schématisations vraisemblables par le moyen de la parole", prenant ainsi largement en compte non seulement le "préconstruit" (le discours en situation) et la construction d'un "micro-univers" de discours, mais aussi toutes les opérations par lesquelles un "locuteur virtuel s'adresse à un autre locuteur virtuel". On aurait pu susciter un exposé sur l'"argumentation", un autre sur les "mécanismes de la référence". J.-P. DESCLES s'attaque aussi à un problème d'énonciation lorsqu'il cherche à créer un système logique des personnes je et tu.

B. S'il est vrai que le colloque avait essentiellement pour but de mesurer l'apport de la logique dans l'analyse de la langue à ses divers niveaux, il n'en demeure pas moins que, soucieux de formaliser les théories qu'il énonce tout d'abord en termes intuitifs, le linguiste se réfère aussi tout naturellement à la logique, science du formel, quand il entend systématiser son métalangage. La théorie linguistique tends à se rapprocher d'une construction axiomatisée par le choix d'un nombre limité de notions primitives et l'écriture formalisée de règles dont le maniement exclut le recours à l'intuition. La formalisation - spontanée lorsqu'elle s'opère, comme chez Harris, à partir des données même de l'observation linguistique, plus artificielle quand elle puise dans les ressources de logiques existantes - permet seule la confrontation effective des modèles, l'appréciation de leur cohérence interne et la juste mesure de leur adéquation aux faits. Les communications liminaires de E. COSERIU et A. CULIOLI font la part de cet aspect très important des rapports linguistique-logique. Sur ce plan, les informaticiens avaient voix au chapitre. Trop souvent, il est vrai, on a confondu codage et formalisation. Mais les exigences de rigueur qu'impose l'ordinateur font une nécessité au linguiste de formuler ses problèmes de manière "logique". C'est ce que montre la communication de G. VEILLON. On sait aussi que les rapports de la logique et de la sémantique se posent de façon cruciale dans les développements actuels de l'informatique linguistique : à preuve l'exposé de Ch. BOITET et J. CHAUCHE.

Au demeurant, il est vrai que tout modèle construit à partir de l'observation des faits doit avoir sa cohérence logique : c'est un des enseignements du travail de Mme V. HUYNH-ARMANET.

Table des matières

  • E. COSERIU : Logique du Langage et Logique de la Grammaire
  • A. CULIOLI : Comment tenter de construire un modèle logique adéquat à la description des langues naturelles
  • J. ROUAULT, A. LECOMTE : Les théories logiques existantes sont surtout un obstacle à la formation des théories linguistiques
  • Y. GENTILHOMME : La proportion langagière
  • J.-B. GRIZE : Logique et organisation du discours
  • R. ZUBER : Conditionnelle : sémantique ou pragmatique ?
  • R. MARTIN : La paraphrase par double antonymie en français
  • B. POTTIER : Théorie des cas : logique et linguistique
  • G. VAN HOUT : Barbara, etc.
  • J.-M. ZEMB : L'analyse de la proposition et le calcul des prédicats
  • J. DAVID : Sur quelques approches logiques de la distinction actants/circonstants
  • J.-P. DESCLES : Description de quelques opérations énonciatives
  • Ch. BOITET, J. CHAUCHE : Approches sémantiques pour les modèles d'analyse automatique de langues naturelles
  • G. VEILLON : La notion de niveau dans les systèmes d'analyse automatique des langues naturelles : une approche informatique
  • J.-E. TYVAERT : Sur la nature logique de la négation
  • V. HUYNH-ARMANET : Les profils paradigmatiques du verbe
  • Chr. ROHRER : Logique temporelle et temps linguistique
Collection
Recherches linguistiques
Date de parution
Nombre de pages
307
Langue(s)
français