Pratiques 194-195 : « Écriture scolaire et universitaire : quelle évaluation pour l’accompagner, quelle formation pour les enseignants ? »

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Revue électronique Pratiques. Linguistique, littérature, didactique

 

 

« Écriture scolaire et universitaire : quelle évaluation pour l’accompagner, quelle formation pour les enseignants ? »

La revue Pratiques a produit de nombreuses livraisons sur l’écriture et sa didactique (pour une recension, voir Garcia-Debanc, 2016), mais aussi, ce qui nous intéresse ici, sur son évaluation. En 1984, le livraison 44 est intégralement consacrée à cette question. L’évaluation de l’écrit d’élève y est en particulier abordée par C. Garcia-Debanc (1984) qui donne des pistes pour une évaluation formative, ou par J.-F. Halté (1984), qui interroge le type et la fonction des annotations portées par un enseignant sur les copies de ses élèves. L’évaluation est ainsi cruciale dans la perspective de la formation de l’élève scripteur-auteur de son texte. Il s’agit de considérer la copie comme le point de départ d’un dialogue entre enseignant et élève, permettant de penser l’écriture comme lieu d’élaboration, d’apprentissage et de réflexivité (Bautier, 2005 ; Jorro, 2013).

Nous poursuivons cette réflexion en proposant dans cette livraison de mettre l’accent sur l’évaluation des copies des élèves par les enseignants dans une perspective de description et d’analyse des « traces » laissées par les enseignants sur les copies des élèves. L’objectif est d’en établir un état des lieux, au regard des nouvelles attentes de « littéracie étendue », telles qu’elles se manifestent dans les programmes scolaires de 2016, et qui puisse alimenter la formation des enseignants à l’évaluation des copies.

Ces traces se manifestent sur la copie sous la forme d’interventions verbales ou non-verbales telles que des commentaires, des interrogations, des suggestions, des biffures, qui renvoient à l’élève la réception de son texte (Doquet & Pilorgé, 2020). Elles constituent, selon les cas, un guidage à la correction, à la réécriture, à la révision, à la reformulation (Bessonnat, 2000), en mettant en évidence pour l’apprenti scripteur les zones de faiblesse de son texte. Ces interventions peuvent être une des formes du dialogue pédagogique (Halté, 1984), dont C. Masseron (2008) souligne la part d’encouragement et d’étayage. Or le travail de J.-L. Pilorgé (2010) a montré qu’un vrai dialogue s’instaure surtout autour des textes les plus « réussis » et celui de M.-L. Elalouf (2016), qui reproduit vingt ans après la première expérience d’annotations sollicitées sur une copie d’élève menée par J.-F. Halté (op. cit.), confirme que l’attention et les interventions des enseignants restent très focalisées sur les dimensions formelles de la langue. Plus récemment, C. Boré et C. Bosredon (2018) catégorisent et analysent les marques apposées par les enseignants sur des copies d’élèves de primaire ; elles montrent que ces traces ont peu changé. En comparant leurs résultats à ceux établis par Fournier (1999) vingt ans plus tôt au collège, elles notent que, malgré quelques différences, les enseignants signalent toujours de manière prépondérante les manques, notamment formels, laissant ainsi peu de place à l’amélioration du texte. Ces diverses études soulignent que les enseignants au mieux laissent dans l’implicite, au pire passent sous silence les dimensions textuelle, générique, énonciative, narrative, etc.

L’étude de grands corpus, comme celui que le projet E:CALM met à disposition (https://www.ortolang.fr/market/corpora/e-calm), pourrait permettre d’instruire de façon plus fine les pratiques évaluatives des enseignants.

En effet, à l’heure où les exigences d’écriture scolaire ont évolué et où est mise en avant l’écriture « pour réfléchir et pour apprendre », comme formulé dans les programmes scolaires de 2016, et avec la diffusion des études de linguistique textuelle (dont témoigne F. Rondelli, 2010), qu’en est-il de ces pratiques enseignantes d’évaluation des copies à l’école, au collège, au lycée et aussi à l’université, où les attendus de maitrise d’une littéracie étendue sont fortement présents ? Les enseignants sont-ils maintenant plus soucieux de situer leurs interventions sur le plan textuel, générique, narratif, énonciatif ? Ces dernières catégories d’interventions sont-elles plus présentes sur certaines copies d’élèves et d’étudiants ?

Comment élargir cette palette des interventions ? Comment accompagner les enseignants vers les gestes professionnels qui leur permettront de jouer pleinement leur rôle de guidage et d’étayage de l’écriture ? C’est sans doute du côté de la formation, tant initiale, dans les masters Métiers de l’Enseignement, de l’Éducation et de la Formation, que continue, dans les stages et interventions pédagogiques, qu’on pourra construire les leviers à même de faire évoluer les postures et conceptions des enseignants et que l’on pourra travailler spécifiquement ces interventions sur les textes d’élèves (Besnard & Elalouf, 2018 ; Jorro, 2011a ; 2013 ; Jorro & Mercier-Brunel, 2011).

Ainsi aujourd’hui choisissons-nous d’approfondir cet ensemble de réflexions sur l’évaluation des écrits scolaires et universitaires à travers les interventions des enseignants sur les copies des élèves. Les propositions d’articles pourront porter sur différentes questions.

Quelle typologie des interventions des enseignants ? Peuvent-elles être mises en lien avec le contexte scolaire (par exemple, classe en réseaux d'éducation prioritaire ou hors réseaux d'éducation prioritaire, les difficultés des élèves et des étudiants, les modalités d’écriture des textes (selon des dispositifs ou des outils particuliers), le genre de texte travaillé (narratif, argumentatif, descriptif, etc), les versions de texte produites, le niveau de classe dans le cursus scolaire et universitaire ? Ces interventions évoluent-elles au fil de la scolarité ? Peut-on y repérer des invariants, des différences, des spécificités, du primaire à l’université ? Si oui, lesquels ?

Quelle cohérence de ces interventions ? Quel rôle jouent-elles dans la correction/révision/réécriture des textes d’élèves ? Les interventions des enseignants permettent-elles aux élèves et étudiants de travailler leur texte pour qu’il réponde aux exigences des programmes et aux attentes en termes de littéracie scolaire et universitaire ?

Quelle formation, initiale et continue, pour permettre aux enseignants, au-delà des dispositifs didactiques et pédagogiques d’accompagnement de l’écriture, de penser et concevoir une pratique d’évaluation qui permette le développement de compétences d’écriture ? Quelle formation pour permettre de se décentrer de la focalisation sur les erreurs « de surface » ?

Comment intégrer les corpus de textes d’élèves dans la formation ? Quelle appropriation des dispositifs proposés en formation par les enseignants dans leur accompagnement du travail d’écriture des élèves ?

Les propositions d’articles seront à envoyer aux coordinatrices de la livraison, sous la forme d’un résumé de trois pages maximum, plus bibliographie, avant le 30 septembre 2021.

Marie-Paule Jacques – marie-paule.jacques@univ-grenoble-alpes.fr

Élise Vinel – elise.vinel@univ-paris8.fr

 

Calendrier prévisionnel

Retour résumés

30 septembre 2021

Date limite réception articles

31 janvier 2022

Publication

décembre 2022

 

Références

Bautier, É., (2005). « Mobilisation de soi, exigences langagières scolaires et processus de différenciation ». Langage et société, 1, p. 51-71.

Besnard, M., & Elalouf, M. L., (2018), (« ré) apprendre à lire des textes de jeunes scripteurs ? ». Le Francais aujourd'hui 203 (4), p. 73-86.

Bessonnat, D., (2000). « Deux ou trois choses que je sais de la réécriture ». Pratiques 105, p. 5-22.

Boré, C., & Bosredon, C., (2018). « Discours enseignant dans des écrits d’élèves d’école élémentaire: Enquête sur le rôle des annotations ». Le français aujourd'hui 203(4), p. 99-112.

Doquet, C. & Pilorgé, J.-L., (2020). « La correction de copies au collège entre langue et discours : une catégorisation syntactico-énonciative ». Repères. Recherches en didactique du français 62, p. 191-213.

Elalouf, M.-L., (2016). « L’analyse linguistique des textes d’élèves au travers des annotations, 1982-2014 », Pratiques 169-170. En ligne : http://journals.openedition.org/pratiques/3150.

Fournier, J.-M., (1999). La Rédaction au collège, pratiques, normes, représentations. Paris : INRP.

Garcia-Debanc, C., (1984). « Une évaluation formative en pédagogie de l'écriture ». Pratiques 44, p. 21-52.

Garcia-Debanc, C., (2016). « Les recherches en didactique du français langue première sur l’enseignement de la production écrite de 1974 à 2014 dans les revues Pratiques et Repères : consensus, controverses et points aveugles, » Pratiques 169-170. En ligne : http://journals.openedition.org/pratiques/3143.

Halté, J.-F., (1984). « L’Annotation des copies, variété ou base du dialogue pédagogique ». Pratiques 44, p. 61‑69.

Jorro, A., (2011a). « Accompagner les équipes enseignantes : soutien, appui ou cheminement ? ». Administration et Éducation 130 (2). p. 71-78.

Jorro, A., & Mercier-Brunel, Y., (2011b). « Les gestes évaluatifs de l’enseignant dans une tâche de correction collective ». Mesure et évaluation en éducation 34 (3). p. 27-50.

Jorro, A., (2013). « L'accompagnement des enseignants dans l'activité évaluative face à des situations de production écrite ». Revue française de linguistique appliquée 18 (1), p. 107-116.

Masseron, C., (2008). « Didactique de l’écriture : enseignement ou apprentissage ? » Pratiques 137-138, p. 79-96.

Pilorgé, J.-L., (2010). « Un lieu de tension entre posture de lecteur et posture de correcteur  : les traces des enseignants de français sur les copies des élèves ». Pratiques 145‑146, p. 85-103.

Rondelli, F., (2010). « Comment les enseignants construisent-ils un objet de savoir ? Exemple de la cohérence textuelle ». Repères. Recherches en didactique du français langue maternelle 42, p. 63-81.

 

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